Assourdie par l’instauration du parti unique
peu avant les indépendances, ladite
guerre est revenue au galop avec le
retour au pluralisme politique en Côte d’Ivoire, à partir de 1990. N’eussent
été «le génie politique» de Laurent Gbagbo, son président fondateur, «l’assise
idéologique solide» de ce parti, et par-dessus tout, le militantisme avéré de
ses militants, le FPI aurait disparu depuis longtemps. Infiltré de l’intérieur
par des cadres achetés, il continue de résister grâce à ses structures et aux
personnalités qui l’animent. Dans ce
sens, la victoire du FPI de Laurent Gbagbo sur l’impérialisme est également et
avant tout celle de l’Organisation des Femmes Front populaire ivoirien (OFFPI)
et de son leader Marie-Odette Lorougnon (MODEL).
2011, l’année de tous les engagements
Nul ne peut évoquer l’année 2011 sans rappeler la
présidentielle de 2010 ; et naturellement, sans évoquer des évènements
antérieurs tels, la rébellion de 2002, les prisons, l’exil et autres. C’est en
2011 que les puissances et les forces
impérialistes, la France, les Etats-Unis, l’Union Européenne, l’Organisation
des Nations Unies, de concert avec la rébellion de 2002 ont renversé le
Président Laurent Gbagbo. C’est en 2011 que le Président Laurent Gbagbo, son
épouse Simone Ehivet Gbagbo, son fils Michel Gbagbo, l’ensemble de la famille
ont subi une dictature sans précédent. C’est cette même année que le Président
Laurent Gbagbo et ses anciens collaborateurs
ont été jetés dans les prisons du Nord du pays, tandis que d’autres ont
pris le chemin de l’exil. Bref, c’est en 2011 que le ciel est tombé sur la tête
du parti qui a pris le pari de la refondation de la Côte d’Ivoire. La chute de
Laurent Gbagbo et sa déportation sont l’aboutissement de longues années de
complots et de démarches diaboliques contre sa personne. C’est en 2011 que
Laurent Gbagbo a subi le procès de tous les maux dont l’accusent la France et
les autres. Et que celui que l’on tient prétendument pour le «père des
escadrons de la mort», pour le «plus grand dictateur», pour «celui qui n’aime
pas les étrangers», va être déporté par tous ses détracteurs. C’est enfin cette
année que la France, les Etats-Unis, l’ONU et l’UE sont rentrés en guerre directement
contre la Côte d’Ivoire estimant qu’ils avaient l’obligation de faire respecter
la démocratie ; décidant qu’Alassane Dramane Ouattara était le vainqueur de la
présidentielle de 2010, alors que les deux candidats au second tour
revendiquaient la victoire. Pour tout dire, 2011 a fait le plein des
excès, au point de mettre en péril,
l’existence du FPI, de Laurent Gbagbo, de sa famille et de tous ceux qui, d’une
manière ou une autre avaient des relations avec lui. Et c’est à juste titre que
l’on prédisait la mort politique, sinon physique, du Président Laurent Gbagbo,
et par voie de conséquence, la fin du FPI. Mais face à la tempête, le FPI a
trouvé la force de dresser ses structures et ses responsables. Pour mener cette
guerre aux couteaux, il fallait veiller sur l’extérieur et l’intérieur de la
maison bleue et blanc et les femmes du FPI et leur leader étaient là.
Comme le dit
l’adage, le bon fruit pourrit toujours de l’intérieur. C’est donc de
l’intérieur du FPI que le mal est parti. En accédant au pouvoir d’Etat, le
Président Laurent Gbagbo en grand démocrate avait cédé son poste de président
du parti à Pascal Affi Nguessan. Dans la bourrasque où Laurent Gbagbo a été
déporté, celui qui avait pris les rênes du parti a été également arrêté. Il revenait
à un certain nombre de militants dont le plus actif était Mamadou Koulibaly de
gérer le parti. Dans ses choix, le président de l’Assemblée nationale
d’alors intriguait. Il faisait campagne
pour tous sauf Gbagbo. En ces temps
pénibles, les gestes du président de l’Assemblée nationale faisaient peser sur
lui des soupçons légitimes. On se rappelle qu’à la Pergola où il rendait visite
aux cadres du FPI en résidence surveillée, il a fait campagne d’accepter que le
cas Gbagbo soit différé pour qu’on règle tous les problèmes et que pour
l’immédiat, on évite de parler de «Gbagbo, le nom qui fâche». C’est dans cette
atmosphère de suspicion que certains survivants du 11 avril 2011 ont été
libérés de la Pergola et d’autres conduits en prison. Entre ceux qui venaient
de la Pergola, ceux que le pouvoir
n’avait pas eus à force de se cacher, il y avait la catégorie de Mamadou
Koulibaly qui était étrangement libre de circulation. Tout ce monde
appréhendait, pour l’essentiel, la nécessité d’agir pour que le FPI survive à
la déportation de Laurent Gbagbo et l’emprisonnement de nombreux
collaborateurs. Tous se sont donc retrouvés au CNRD, dans le mois de juillet
2011 «dans un cadre pas vraiment formel», se souvient un témoin. C’est Mamadou
Koulibaly qui dirigeait la réunion. Pour lui, il fallait non seulement éviter
de parler de Gbagbo, mais il soutenait même la réforme en profondeur le FPI, à
la limite «le faire changer de nom». Le moins que l’on puisse dire, c’est que
les projets de Mamadou Koulibaly ne plaisaient pas du tout à la Nationale. Et
les interventions, les oppositions de ‘’Model’’ agaçaient le président de
l’Assemblée nationale à l’époque. «Sans se poser de question et «toujours
agissant en avant-garde pour la protection du parti», Marie-Odette Lorougnon,
bien que traquée comme tous les autres collaborateurs de Laurent Gbagbo, a
sonné la résistance», comme le raconte un ancien de la Pergola. «Nous n’avons
pas le droit d’oublier Laurent Gbagbo et nous n’avons pas non plus le droit de
réformer le parti qu’il a créé pendant qu’il est en difficulté»,
défendait-elle. Sa révolte et sa voix ont été suivies pour la plupart, par les
fédéraux de l’époque. Plus agacé que contrarié, Koulibaly a claqué la porte.
Cette rencontre avec ‘’Model’’ révoltée rappelle une autre
en avril 2011. Cette fin de mois de Mars, la situation était plus que critique
pour le pouvoir des refondateurs. Ce jour en particulier, Laurent Gbagbo devait
faire une adresse à la nation après des temps difficiles d’une crise sanglante
déclenchée par la France, les Etats- Unis l’ONU, l’UE et les rebelles de Soro
Guillaume. Dans un premier temps, le FPI avait une réunion déterminante chez le
Premier ministre Affi Nguessan. La Nationale avait raté de justesse cette
réunion d’intérêt crucial, mais s’était laissé dire qu’une partie de la
direction du FPI voulait que Laurent Gbagbo laisse le pouvoir aux rebelles.
Selon des sources, dans le secret, c’est Voho Sahi qui était chargé de rédiger
la lettre de la capitulation. Ici encore,
‘’Model’’ a sonné la révolte en disant : «Le Président Gbagbo ne lira pas ce
discours». Pour elle, ce n’était pas le moment pour le Président d’abandonner
le peuple après tant de sacrifices. En outre, elle estimait que Laurent Gbagbo
n’était pas du genre de ceux qui abandonnent son peuple. Ceux qui en veulent au
FPI n’étaient pas au bout de leurs peines avec ‘’Model’’. « Bien plus tard,
Affi Nguessan a trouvé Marie-Odette Lorougnon sur son chemin, quand il a
projeté de «tourner la page de Laurent Gbagbo».
«Elle était présente au Congrès
de la résistance de Mama», témoigne un journaliste. Pour la plupart des
militants, la force de ‘’Model’’ s’explique. Elle repose sur deux sources,
personnelle et collective.
Partout où elle s’est engagée, la Nationale avait derrière elle l’Organisation des femmes du Front populaire ivoirien (OFFPI). Comme le témoignent plusieurs membres de la direction du FPI, celle qui est désormais une vice-présidente du parti fait corps avec son organisation. Cette structure spécialisée s’impose par son organisation, sa discipline. En tant que structure spécialisée, elle est représentée au niveau du comité de base, de la section, de la fédération et des instances de direction du parti. Grâce à la discipline, elle est désormais le fer de lance de grands combats. «Il suffit que la direction du parti lance un mot d’ordre, que ce mot d’ordre soit relayée par la Nationale pour que les femmes se mettent en posture de lutte. Elles fonctionnent à partir des consignes du parti ; mais les femmes, à travers leur direction, ont pris beaucoup d’initiatives salutaires», informe une source au Comité central. Selon des sources concordantes, chaque fois que ‘’Model’’ s’est engagée, c’est en tant que Nationale.
Ayoualou ZIZA