Alassane Dramane Ouattara

Le crépuscule des élus par défaut

  • Kifuima TOURE
  • 17-02-2021 à 11:03
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 Le processus démocratique a pris du plomb dans les ailes avec l’arrivée d’un certain Alassane Dramane Ouattara dans la sphère politique ivoirienne, en 1990. Invité pour faire réussir les plans d’ajustement structurel, le futur mentor du Rassemblement des Républicains a vite glissé vers la politique et s’est inscrit sur la liste des héritiers. Justement, dans la perspective d’être au pouvoir dès son arrivée en Côte d’Ivoire, Alassane Dramane Ouattara a fait obstacle à l’application de la Constitution de 1960. Conformément aux dispositions de l’article 11, il était prescrit qu’en cas de vacance du pouvoir de la Présidence de la République, c’est le président de l’Assemblée nationale qui accédait au trône. Le technocrate ne l’entendait pas de cette oreille. Ce premier essai a aiguisé son appétit de prendre le pouvoir à tout prix.

Après le forfait de 1993, il y a eu un coup d’Etat de Décembre 1999. Henri Konan fut renversé par la force. Cette autre dérive a prononcé, sinon accentué  l’envie des putschistes d’avoir le pouvoir ici et maintenant.

 En dépit des élections démocratiques de 2000 où le pays s’est doté, de surcroit, d’une nouvelle Constitution, une rébellion a vu le jour. Un certain Soro Guillaume a revendiqué avoir pris les armes pour que le président du RDR, Alassane Dramane Ouattara, alors inéligible à la présidentielle, soit candidat. C’est cette intrusion de la force dans la politique qui a mis un frein au processus démocratique.

De 2005 à 2010, la démocratie a donc connu un coup d’arrêt. Laurent Gbagbo, alors Président de la République, estimant qu’il était bon de revenir au processus démocratique et électoral a confié l’organisation de la présidentielle de 2010 à Soro Guillaume, alors Premier ministre. Cette échéance initiée par Laurent Gbagbo, au-delà de toute autre considération, visait ainsi non seulement à relancer le processus électoral, mais surtout à sortir de façon définitive le pays de la crise postélectorale de 2010. A partir de 2010, étant donné que les abonnés aux coups d’Etat étaient au pouvoir, personne n’envisageait  dorénavant  qu’un coup de force pouvait arriver. Mais alors, les anciens putschistes ouvraient un autre registre, celui des personnalités qui n’auraient jamais pu être élues en temps normal et qui sont élues sans compétition, par défaut. En effet ayant pris en otage les instruments institutionnels d’organisation des élections, le RDR d’Alassane Dramane Ouattara opérait des passages en force. En 2015, il a obtenu du PDCi le droit de se présenter seul ou pour le compte des deux. L’ayant réussi, le RDR a installé une Commission électorale indépendante en s’octroyant une représentation déséquilibrée. Il a fait élaborer une loi électorale taillée sur mesure et s’est fait écrire une Constitution. Au regard de ses balises, l’Opposition a décidé aussi bien en 2015 qu’en 2020, de boycotter le processus électoral. Ainsi, en 2015, le pays a eu droit à un chef d’Etat par défaut. Pour la même année, la nation  a eu des représentants, des députés par défaut, les sénateurs par défaut, les présidents de conseils régionaux par défaut, et les maires par défaut. En 2020, il y a eu encore un chef d’Etat par défaut à cause des instruments d’organisations des élections qui ont choisi les candidats qu’Alassane Dramane Ouattara voulait affronter. Sur 40 prétendants, le candidat du RDR s’est offert seulement 4. Mais l’eau a coulé sous le pont. L’alliance des enfants opposés a naturellement fini par mal tourner. Par ailleurs à cause des concours de circonstance, le FPI et le PDCI qui ont des intérêts communs quelque part se sont retrouvés côte à côte contre le RDR. Ils ont décidé de se présenter pour les Législatives de 2021 et cette échéance sonne le glas des élus par défaut. Désormais les populations auront droit à des élus compétitifs ; des personnalités qui n’ont pas été choisies parce que tel ou tel parti a boycotté les élections. Désormais notre nation sera représentée par de vrais élus et non des gens par défaut.

Ayoualou ZIZA

bohuiarmand@yahoo.fr